Take shelter
Jeff Nichols ne nous emmène pas bien loin dans ce film. Il se contente de nous enfermer dans la tête d'un homme de la classe ouvrière américaine qui fait chaque nuit des rêves de cataclysmes météorologiques et de folie collective se mêlant parfois à la réalité et lui faisant perdre la notion de ce qui est affabulé et de ce qui se déroule vraiment.
Croyant sombrer dans la paranoïa, voire dans la schizophrénie, le personnage magistralement interprété par Michael Shannon nous entraîne à l'intérieur de ses troubles jusqu'à désorienter le spectateur.
La musique est absente afin de rendre l'atmosphère qui gagne petit à petit en lourdeur. L'esthétisme est épuré avec des scènes en extérieur d'une netteté impressionnante, d'une propreté gênante, afin de mettre en relief le personnage principal et les autres acteurs sur un fond fade et quasi-absent. Les plans sont longs et fixes dans le but d'isoler le spectateur face à la supposée démence de Curtis, comme aurait pu faire Stanley Kubrick dans l'une de ses oeuvres.
"Take shelter" est un huit-clos psychologique déstabilisant qui mêle l'angoisse de la solitude et l'impression d'être le seul à avoir conscience du réel, un peu comme dans "L'antre de la folie" de John Carpenter, le fantastique horrifiant en moins.