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Il était une fois dans l'Ouest

 

   Monument du western, "C'era una volta il West" est le premier film de ce qu'on surnomme la trilogie "Il était une fois" avec "Il était une fois la révolution" (1971) et "Il était une fois en Amérique" (1984). C'est le 21 décembre 1968 que l'Italie découvre ce chef d'oeuvre de Sergio Leone accompagné d'une partition d'Ennio Morricone dont les airs resteront gravés parmi les plus fameux du 7ème Art.

 

  Dans ce long-métrage, un homme solitaire habile de son pistolet et bavard de son harmonica s'emploie à protéger une jeune veuve d'une bande de truands. Les dialogues, peu nombreux entre les longs plans extérieurs et les échanges de regards, sont tantôt d'un basique très typique du cinéma Leone afin de relever l'aspect rudimentaire et primitif du rapport entre les hommes à cette époque, tantôt mis en relief par des répliques cinglantes et merveilleusement bien écrites dont la tournure si fameuse est entrée dans la légende du western.

 

    Le film s'ouvre avec une séquence du plus fin spectacle : une utilisation des bruitages et des alternances entre d'extrêmes profondeurs de champ et d'extrêmes gros plans. Ces bouleversements successifs ont pour effet de mettre en relief la bestialité du scénario en agrémentant les scènes de chocs visuels profondément clivants.

 

    La photographie relève d'un jeu emblématique du western signé Leone. La lumière fait office, au même titre que le décor, de séparation entre les scènes intérieures et extérieures. Les jeux d'ombres et de lumières tamisées ou atténuées illustrent ainsi les passages tournés dans les bâtiments de l'ouest américain, comme lors de la scène intime entre Henry Fonda et Claudia Cardinale. La domination du premier sur la seconde et le rapport de force verbal entre les personnages sont soulignés par des ombres que chaque protagoniste fait passer sur le corps de l'autre. A l'opposé, les éclairages aveuglants témoignent de passages en extérieur afin de traduire visuellement la lourdeur du soleil et de la chaleur.

 

    Les acteurs principaux ne sont autres que Charles Bronson dans le rôle d'un homme énigmatique dont on ne connaît jamais le nom et dont la loquacité n'est pas évidente, Henry Fonda dans le rôle d'un tueur de sang-froid impitoyable et impassible, Claudia Cardinale dont l'interprétation est largement écrasée par celle de ses partenaires, et Jason Robards dont le visage parfaitement travaillé impose une marque à la totalité du film. D'ailleurs, l’œuvre déborde de ces expressions charismatiques grâce à la prestation livrée par le trio des acteurs masculins dont les regards s'entrecroisent au même titre que leurs destins, comme il en est si souvent dans le cinéma de Sergio Leone.

 

   Dans le but de leur offrir des silhouettes impressionnantes, les cache-poussières utilisés dans la première scène par les acteurs marquent le début d'un long-métrage où les costumes jouent un rôle primordial dans cette mise en scène. Les personnages judicieusement disposés à l'écran, comme lors de la scène d'introduction sur le quai de la gare ou l'arrivée de Fonda et de son groupe à la ferme McBain, jouissent d'une allure minutieusement dessinée qui met en relief la cruauté du scénario.

 

    Et dans la combinaison de ces éléments, Sergio Leone construit une mise en scène particulièrement efficace en employant ses fameuses techniques ainsi qu'une partie de symbolique comme le souligne l'utilisation des formes circulaires et des lignes irrégulières comme relevant d'une pureté rudimentaire face aux formes géométriques dures reliant les personnages se faisant face dans la cruauté. A titre d'exemple, on peut citer l'image devenue célèbre de l'homme pendu à une arche en pierre dont la forme raide casse le cercle pur de l'architecture. Ou bien la ligne reliant Fonda et Bronson lors de leur affrontement se déroulant dans un espace que l'on devine circulaire.

 

    Afin de souligner cette mise en scène soignée, Ennio Morricone signe une partition mesurée alternant les airs d'harmonica et les passages grandioses qui se lient merveilleusement avec les images désertiques et les longues séquences de défi. On remarquera, par exemple, la guitare retentissante survenant au moment où Charles Bronson apparaît à l'écran afin d'affronter Henry Fonda, ou bien l'ultra-célèbre air de quelques notes joué à l'hamonica à plusieurs reprises dans le film.

 

    Techniques maîtrisées, acteurs exceptionnels, mise en scène parfaite et musique grandiose, ce film est un chef d’œuvre du genre mené par un Sergio Leone magistral et livrant un long-métrage irréprochable et sans faille.

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