JFK
Le 20 décembre 1991, Oliver Stone dévoile un nouveau chef d’œuvre. Dans sa perspective d'anthologie américaine, le grand réalisateur accouche alors d'un film polémique : "JFK". Dans ce long-métrage, le metteur en scène raconte l'enquête complexe et dangereuse menée par Jim Garrison, procureur de la Nouvelle-Orléans, persuadé que la thèse officielle de l'assassinat du Président Kennedy ne correspond pas à la réalité de l'Histoire.
Avec un scénario aussi compliqué à traiter, Stone fait des merveilles. Il faut dire qu'il s'est entouré de deux acolytes réputés afin de l'écrire : Jim Marrs (essayiste complotiste américain) ainsi que Jim Garrison lui-même, lequel apparaît d'ailleurs brièvement dans le film pour interpréter Earl Warren, président de la commission ayant émis le rapport Warren contre lequel s'est battu Garrison. L'alliance de ce scénario audacieusement franc et des dialogues à la fois denses, précis et techniques offre au film une véritable épaisseur et un contenu absolument propice à la réflexion. D'autant plus que les arguments avancés sont extrêmement variés, les témoins mis en scène extrêmement pluriels et la retranscription des événements historiques proche à la fois de l'évolution politique post-assassinat et de la pression subie par l'équipe de Garrison.
Le film s'ouvre avec un générique sur lequel se succèdent des images d'archive et des roulements de caisse angoissants. D'abord un extrait du discours prononcé à la télévision par le président sortant Dwight Eisenhower. Ensuite, une rapide rétrospective de la présidence Kennedy en quelques minutes s'achevant par des images du 22 novembre 1963. L'utilisation de ces archives mêlées à un suspense insoutenable malgré une issue que l'on sait pertinemment inexorable introduit le film avec force.
Tout le reste du long-métrage démontre une capacité incroyable à faire monter la pression sur le spectateur autant que sur les personnages. Le film s'immisce dans la vie privée de Garrison tout autant que dans sa vie de juriste convaincu par la théorie du complot. L'avancée de l'enquête et les multiples rebondissements enrichissent le scénario d'une énergie considérable.
La musique fabuleuse, composée par John Williams pour ce film, accompagne, dans un bouleversement systématique et tonitruant, le scénario dans sa course contre la montre et le gouvernement. La mise en scène puise énormément dans cette partition parfaitement efficace afin de faire progresser la succession des séquences et la collision des personnages à un rythme effréné, permanent et inépuisable.
Kevin Costner, à la tête du casting, s'offre une performance très convaincante qui ponctue le film de ses dialogues multiples et interprétés de manière irréprochable. A ses côtés, Tommy Lee Jones, Joe Pesci, Kevin Bacon ou Gary Oldman livrent des prestations très satisfaisantes et respectueuses à la fois de la volonté scénaristique mais aussi des personnages historiques qu'ils sont chargés d'interpréter. Cette série d'acteurs ainsi que la myriade de protagonistes évoqués par le film contribuent à son enrichissement mais aussi à une pluralité de caractères qui évoque la pluralité des acteurs de l'assassinat.
"JFK" est un film palpitant dont la sortie marque à coup sûr une négation évidente de la théorie officielle et qui, tout en bousculant les esprits de manière puissante et argumentée, aboutit à un long-métrage travaillé et profondément efficace.