funny games
Deux jeunes d'une vingtaine d'années séquestrent un couple et leur enfant dans le domicile familial du ménage. La situation est initialement d'une douceur délassante puis s'envenime très rapidement jusqu'à aboutir à une explosion de violence. Plusieurs facettes de ce long-métrage méritent l'attention de cette critique.
D'abord les décors exceptionnels de ce chef d'oeuvre visuel, créés par Kevin Thompson. En effet, ceux-ci sont d'une blancheur aveuglante, comme si le sentiment d'oppression venait directement de la lumière dégagée par une couleur omniprésente et lancinante. Les costumes entrent d'ailleurs dans ce jeu sous la direction de David Robinson. Tout ce cadre idéal à l'intrigue écrasante relève d'une habile utilisation des plans pour véhiculer l'image de douceur et d'élégance dont les deux jeunes se vantent. L'image revêt ainsi un calme qui tranche avec la violence intellectuelle striant le film. Avec ce "Funny games", c'est l'esprit du spectateur qui prend une claque monumentale alors que l'aspect visuel est au contraire très réconfortant.
Ensuite, il faut préciser que le long-métrage brise complètement le quatrième mur en faisant sortir le scénario du cercle des personnages puisque l'un des deux psychopathes s'adresse à plusieurs reprises aux spectateurs derrière l'écran en leur parlant du film, comme s'il s'agissait d'une mise en scène réellement revendiquée comme telle.
Les dialogues, d'une qualité renversante, semblent emporter le spectateur dans un perpétuel tourbillon inexorable en même temps qu'ils y projettent les personnages. En effet, celui-ci aura, au contact des différentes scènes de ce film, l'impression d'y être intégré comme un protagoniste à part entière. Les deux acteurs principaux, Naomi Watts et Tim Roth, comblant l'absence volontaire de musique par des prestations artistiques exceptionnelles aident cette manipulation en se rapprochant du spectateur par des interprétations proches de celles qu'imaginent les spectateurs.
Ce film, tourné avec une immense rigueur esthétique, minutieusement travaillé et ingénieusement conçu, parvient à entraîner le spectateur dans un scénario où il ne désire pas du tout se retrouver. La prouesse est de taille et permet au film de se hisser parmi les grands travaux esthétiques et psychologiques de la décennie.
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