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reservoir dogs

 

   Le 21 janvier 1992 demeurera, dans l'histoire du cinéma, comme le jour où le premier film de Quentin Tarantino est arrivé sur un grand écran. Et c'est pour un festival américain. Le long-métrage passera ensuite un an à être projeté dans toutes les grandes réunions des éminents personnages du 7ème Art, dont Cannes et Avignon en France.

 

   Le film raconte l'histoire d'une bande de truands dont l'opération de braquage, ratée, les oblige à se retrancher dans un hangar convenu comme lieu de réunion dans le cas où le plan tournerait mal. En plus de cloîtrer les fortes personnalités des protagonistes dans un lieu clos, Tarantino nous propose un travail scénaristique extrêmement riche en dialogues puisqu'il ne se passe pas une minute sans qu'une effusion de propos acides ne vienne envahir l'oreille du spectateur. La présence constante de dialogues exaspérés et paniqués contribue à l'oppression qui coule comme un sang bouillonnant dans les veines de cette réalisation.

 

   Les acteurs sont un atout aussi important que les personnages qu'ils interprètent. Quentin Tarantino présente ainsi une distribution dans laquelle une jeune génération composée de Steve Buscemi, Tim Roth, Michael Madsen ou Chris Penn se retrouvent face à des acteurs expérimentés comme Harvey Keitel, Edward Bunker ou Lawrence Tierney. Les électrons libres qu'ils sont tous dans ce long-métrage s'entrechoquent pendant plus d'une heure trente au service de dialogues puissants. L'ambiguïté est maintenue en permanence sur la loyauté de chacun puisque la trame de fond consiste à essayer de savoir si l'un des braqueurs est de mèche avec la police et a piégé tous les autres. Au service de ce fil rouge, des retours dans le passé pour remonter aux origines de la collaboration entre le chef de l'opération et Mr White, Mr Blonde, Mr Orange ou Mr Pink.

 

   Pour un premier film, et avec un budget restreint, le style Tarantino est déjà suffisamment abouti pour voir dans ce long-métrage l'oeuvre d'un grand réalisateur. La couleur dominante est le rouge, mais avec un naturel incomparable aux effusions de "Kill Bill" (2003) ou "Django unchained" (2012). La violence est omniprésente et fait monter la tension par soubresauts, tout en se laissant entrecouper par des flashs qu'on aurait pu considérer comme apaisants si l'on ne connaissait pas l'issue finale de l'action principale qu'est le braquage. Le rapport entre les scènes et la musique ne manque déjà pas de cynisme ni de juste orchestration. Le film semble être constitué de dosages absolument pertinents.

 

   "Reservoir dogs" est un chef d'oeuvre signé Tarantino qui semble parfois parodier les genres avec, par exemple, des scènes sanglantes où Harvey Keitel et Tim Roth sont filmés comme des amants le seraient dans un film romantique. Réalisateur, acteur et scénariste, Tarantino réalise des exploits techniques comme celui de la première scène qui se construit grâce à une caméra pluri-subjective. Ce film est le premier du grand réalisateur en même temps que le premier grand film du réalisateur.

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