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12 hommes en colère

 

   Le 10 avril 1957 est un jour historique dans la chronologie du 7ème Art puisqu'il marque la sortie du premier film de Sidney Lumet, un huit-clos durant lequel les douze jurés d'un procès pour meurtre doivent décider de la culpabilité d'un homme qui risque la peine capitale.

 

   Le sens du détail et de la symbolique est manifeste. A titre de témoins, nous citerons les permanents rapports de forces et les fluctuations visuelles. Par rapports de forces, il faut entendre le nombre de personnes présentes sur chaque plan, le placement des acteurs selon la profondeur de champ ou le personnage derrière lequel se place la caméra pour filmer tous les autres. Par « fluctuations visuelles », il faut entendre, par exemple, le nombre des vestes dans la penderie, le nombre de jurés assis ou debout, le placement des personnages dans la pièce par rapport à tous les autres ou les prises de position des jurés.

 

  Les décors sont conçus de manière à écraser les personnages et ainsi à ajouter de nouveaux éléments à l'atmosphère étouffante du film. Le long métrage s'ouvre avec des plans muets sur un immense bâtiment, d'abord filmés en contre-plongée sans présence humaine puis en plongée avec un fourmillement de personnages inconnus. La taille gigantesque du lieu rétrécit considérablement l'échelle des protagonistes qui se retrouvent ensuite enfermée dans une salle étriquée où le matériau principal n'est plus du marbre mais du bois. A l'extérieur, par les fenêtres, on voit la ville de New-York s'étendant à perte de vue, ce qui isole considérablement les douze individus dans un lieu de superficie restreinte. De plus, les personnages ne cessent de faire référence à la chaleur écrasante qui règne sur l'ensemble du film. Tout cela contribue à clore toutes les échappatoires et à clouer le spectateur dans la salle de délibération du jury avec les douze protagonistes.

 

   Le scénario utilise ses subtilités au profit de personnages très psychologiques, très complexes et très profonds. Leurs interprètes, parmi lesquels Henry Fonda offrent tout leur relief aux personnalités s'entrechoquant du début à la fin du long-métrage. Leurs caractères sont d'ailleurs visuellement travaillés par la direction de la photographie menée par le talentueux Boris Kaufman. Sa structure esthétique est taillée par les teintes éblouissantes des chemises et des bulletins de vote des personnages, en opposition avec les cravates qui les étranglent et les murs qui les enferment.

 

   De plus, le déroulement des événements aborde de nombreux thèmes qui s'entremêlent habilement. Parmi ceux-ci, les questions de la culpabilité, de la nature humaine, des classes sociales, du doute, de la peine de mort, du fourmillement de la société, de la justice, de la vengeance ou de l'expérience au sens philosophique.

 

   "12 hommes en colère" est un pur chef-d’œuvre, une merveille cinématographique qui, de surcroît, est le premier film de son réalisateur. Le long-métrage est fin, brillant, vif, ciselé et aiguisé au point de décrocher sa place parmi les plus grands films du 7ème Art.

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