top of page

Star Wars I - La menace fantôme

 

   Le 19 mai 1999, George Lucas revient à la réalisation de la saga "Star Wars" aux manettes d'une prélogie débutant avec "La menace fantôme" et supposée raconter la chute de la République galactique ainsi que la proclamation de l'Empire.

 

   Avec ce film, Lucas nous emmène dans les valises d'Obi-Wan Kenobi, alors jeune padawan, et de son maître Qui-Gon Jinn. Ceux-ci, envoyés secrètement par le Chancelier Suprême de la République afin de résoudre un conflit diplomatique entre la puissante Fédération du Commerce et la reine Amidala, laquelle Fédération envahit la planète Naboo suite à l'instauration d'une taxe commerciale proposée par le sénateur naboo Palpatine.

 

   La séquence introductive fait découvrir au spectateur nombre d'éléments nouveaux : le Sénat, le Congrès, la République galactique, la reine Amidala, la Fédération du Commerce, Dark Sidious, le Chancelier Valorum, la planète Naboo et une immense nébuleuse politique dont la dimension n'avait jusqu'alors pas été exploitée par la saga.

 

   Néanmoins, George Lucas fait rapidement appel à des éléments connus par les spectateurs. En premier lieu, une mission Jedi grâce à laquelle on peut découvrir le mythique Obi-Wan dans sa jeunesse d'apprenti. Ensuite, le scénario amène les personnages à explorer Tatooine, planète apparaissant déjà dans "Un nouvel espoir" (1977) et étant d'ailleurs la première à faire son apparition dans le premier film de la saga. On rencontre Yoda, qui n'est pas pour autant dans sa jeunesse d'apprenti, rappelant les épisodes V et VI ; on se fait nommer Bail Organa dont on apprend, dans la première trilogie, qu'il a élevé la princesse Leia ; on assiste à des débats sur la présence supposée ou la puissance controversée de la Force ; on rencontre deux droïdes étrangement familiers : R2-D2, qui œuvre sur le vaisseau de la reine Amidala, et C-3PO qu'Anakin assemble dans sa chambre à partir de pièces détachées.

 

   Le scénario ne possède, en sa construction, aucun lien avec celui de la première trilogie puisqu'au delà de la création cette prélogie est chargée d'établir une situation connue. D'où la complexité de l'alliance entre l'inventivité et la cohérence. Outre cela, le spectateur remarquera l'intrigue politique prenant possession de "La menace fantôme", emmenant le spectateur dans une dimension réellement distinguable des trois opus de 1977, 1980 et 1983. On comprend, a posteriori, la perplexité de certains inconditionnels de la première trilogie devant ce nouvel univers peuplé de créatures nouvelles, de planètes jusqu'alors inconnues, de personnages fraîchement inventés et de construction scénaristique inédite, surtout en l'absence de "L'attaque des clones" (2002) et "La revanche des Siths" (2005) reliant cette quatrième réalisation à la première trilogie.

 

   La technique qui fait son immense entrée est celle de l'image de synthèse, transformant "Star Wars" d'une franchise promouvant la création artistique matérielle concernant les effets spéciaux en un ensemble d'acteurs jouant devant des fonds verts retravaillés par ordinateur. L'aspect très authentique de la première trilogie s'échappe ainsi avec la systématisation des pratiques informatiques.

 

   La technologie permet, entre autres, de prolonger l'inventivité sonore de la première trilogie. Entre les blasters, les tirs des canons, les droïdes, les vaisseaux et la scène, exceptionnellement jouissive d'un point de vue auditif, de la course de modules, le film se nourrit puissamment de l'univers fertile des bruitages identifiés Star Wars.

 

   La direction de la photographie est absolument incomparable avec celle de la trilogie originelle. Alors que dans les trois premiers films le spectateur découvrait des tonalités et des lumières froides en extérieur et glaciales en intérieur, le début de cette prélogie établit une chaleur omniprésente grâce à des couleurs chaudes et des lumières vives.

 

   Parmi les grands moments, on mentionnera le combat au sabre laser entre Obi-Wan Kenobi et Dark Maul lesquels, dans une chorégraphie parfaite, rendent sublime l'inspiration samouraï des chevaliers Jedi et des seigneurs noirs des Siths. Cette source de la saga n'avait jamais été autant explorée dans la première trilogie. La mythologie entourant l'Ordre des Jedis est le catalyseur de cet esprit de combat prenant tout son sens dans la trilogie et s'imposant comme l'une des principales inspirations cinématographiques.

 

   Néanmoins, ce piédestal se met en opposition avec la fermeture affirmée à d'autres genres. Quid de l'épopée chevaleresque ? Là où "Un nouvel espoir" nous présentait une sorte de quête du roi Arthur revisitée en aventure galactique, "La menace fantôme" est davantage axée sur un scénario à mettre en forme que sur un art de réalisation à scénariser. Quid du western matérialisé dans la première trilogie par la chevauchée héroïque de Han Solo équipé de son Faucon Millenium ?

 

   La mythologie s'agrémente cependant de religion dans cet épisode I puisque la naissance inexpliquée d'un Anakin n'ayant pas de père tient de l'allusion biblique davantage que de l'univers de la science-fiction. Cet élément se mêle à une construction inspirée du péplum : les logements rudimentaires, les codes vestimentaires, les jeux populaires où l'on risque sa vie ainsi que les paris sont autant de détails propres à justifier un rapprochement entre l'aventure des Jedis et celle des gladiateurs.

 

   Le film s'achève, en outre, sur une séquence de célébration faisant écho à celle de l'épisode IV sur la base rebelle de Yavin IV. Sa musicalité entraînante évoque une atmosphère complètement étrangère à l'univers de "Un nouvel espoir" dans la mesure où la festivité finale du film de 1977 est celle de la récompense militaire davantage que celle de la célébration fédératrice.

 

   En définitive, cet épisode I est le commencement d'une prélogie réellement différente de la première trilogie en ce qu'il développe, avec des éléments communs, un univers totalement distinct partagé entre la tentation de créer une autre version de la galaxie lointaine (très lointaine) et l'objectif d'expliquer les tenants et les aboutissants d'une trilogie originelle noire, puissante et riche.

bottom of page